dimanche 20 février 2011

The shop around the corner (Ernst Lubitsch, 1940)







C'est peut-être le plan le plus désespéré de toute l'oeuvre du berlinois. Plus encore que celui des immeubles varsoviens en ruine (To be or not to be, 1942) et bien plus que les scènes contrites de Broken Lullaby.
L'homme avec qui Klara (Margaret Sullavan) entretient une correspondance ne s'est pas présenté au rendez-vous qu'il lui avait fixé (ou plutôt, il s'est présenté mais ne s'est pas fait reconnaître). Klara a passé son humeur sur son collègue de travail (James Stewart) qui se trouvait par hasard dans le café du rendez-vous (en fait, le mystérieux correspondant). Elle se rend ensuite à la poste, espérant y trouver une lettre d'excuse. Après un rapide travelling sur les boîtes postales, le point se fait sur le numéro du casier puis sur la main gantée qui ouvre la boîte. Cette main palpe les parois de l'alvéole sans rien y trouver. Avec une incroyable économie de moyens (pas de musique extradiégétique, une image fixe), Lubitsch plonge le spectateur dans le plus parfait désarroi (d'autant que lui sait à l'avance que la boîte est vide). Sur l'image qui suit, Klara semble avoir vieilli de dix ans, faisant passer sur cette comédie une amertume qui contaminera jusqu'au happy end, plus désenchanté qu'à l'habitude.

5 commentaires:

  1. Magnifique.
    Parfait.
    Le plan autant que son évocation.

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  2. oh que oui!
    un plan qui doit beaucoup au talent de cette merveilleuse actrice qu'était Margaret Sullavan.

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  3. Elle n'avait pas la séduction immédiate de Gene Tierney ou d'Ingrid Bergman mais c'était effectivement une merveilleuse actrice. Et cette voix tant admirée par Louise Brooks : "That wonderful voice of hers- strange, fey, mysterious - like a voice singing in the snow "

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  4. oui, en parlant de snow, elle y a tourné ses deux plus beaux films: The shop around the corner donc mais aussi The mortal storm, le chef d'oeuvre anti-nazi de Frank Borzage. Deux films tournés en 1940, deux films avec James Stewart, deux films restés longtemps inédits en France, deux films absolument sublimes.

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  5. J'ai découvert ce bijou il y a peu et on est en droit de s'étonner de l'absence d'une édition française correcte !

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